Direction Bozaï Gombaz, par la basse vallée
À Sarhad-e Broghil, nous récupérons nos chevaux et nous grimpons les premières pentes menant vers le petit Pamir, nous traversons le Daliz Pass, un premier col à 4267m puis nous suivons la rivière Wakhan à travers un sublime labyrinthe minéral, passant par Borak et Langar, des campements Wakhis.
Les Wakhis vivent dans le Corridor du Wakhan, entre 2000 et 3000m, ils cultivent essentiellement le blé, lorge, les pommes de terre. Lété, ils emmènent leurs bêtes à la pâture sur les hauts plateaux.
À Bozai Gumbaz, des tombes kirghizes se dressent à côté de fils barbelés rouillés, restes dune base militaire soviétique
Nous rencontrons quelques militaires stationnés en ce lieu stratégique (contrôle des passeports). En effet, de là, 3 vallées mènent en quelques jours de marche à la Chine, au Tadjikistan et au Pakistan !
Ici, commencent aussi les terres kirghizes, nous devons donc échanger nos chevaux wakhis contre des yacks kirghizes. Ainsi, on fait gagner de largent aux 2 communautés.

Le lac Chaqmaqtin
Encore une journée de marche sur ce plateau pamiri, entrecoupée de quelques passages à gué, avant de séchouer sur les rives du lac Chaqmaqtin, parsemées de yourtes, maisons dété de familles kirghizes.
Contrairement aux Wakhis, les Kirghizes sont des nomades (et dexcellents cavaliers !) : ils vivent en yourtes et se déplacent au gré du climat et des pâturages. Leurs campements se situent entre 4000 et 4500m et ils vivent de leurs troupeaux. Pour compléter leur alimentation peu diversifiée (pain, yaourt et parfois un peu de viande et de riz), ils ont recours au troc avec les marchands ambulants et leurs voisins Wakhis.

Lors dun après-midi de repos, moi et Christine, nous nous » échappons » pour aller à la rencontre de ces nomades
à la découverte de leurs activités quotidiennes, tournées essentiellement vers le troupeau (moutons, chèvres, yacks) : gardiennage, traite (activité exclusivement féminine), fabrication du yaourt, de la crème, du beurre
Un peu de marche, premier campement au bord du lac, 4 yourtes et des yacks
Yes
Un homme et un enfant sont assis dehors devant une des yourtes. Ils sont rejoints par 2 femmes vêtues de longues robes rouges plissées. Lune delles revêt une haute coiffe blanche traditionnelle, celle des femmes mariées ; lautre une coiffe rouge, cest donc une jeune fille. Toutes deux portent des colliers faits de pièces de monnaie, de boutons, dépingles à nourrice, de coupe-ongles
bref un peu tout et nimporte quoi, du moment que ça brille ;-).

Nous sommes invitées à entrer dans une yourte. On ne communique que par gestes. On ne peut donc « goûter » à cette rencontre que par les yeux. Mon regard balaie cette yourte. Cest une explosion de couleurs. Partout dénormes piles de couvertures aux couleurs plutôt vives, aux divers motifs de préférence brillants, sont empilées sur des coffres cadenassés, eux-mêmes empilés les uns sur les autres. Dans un coin de la yourte, un rideau sépare la cuisine très sommaire, seulement quelques ustensiles de cuisine et des seaux remplis de lait, du reste.
On se dévisage, on se sourit timidement… Comment briser la glace ?
Christine a un appareil photo facile dutilisation, jai des Traou Mad 😉 Et si on jouait à « Je te prends, tu me prends en photo » ??!! Christine leur apprend les quelques rudiments de la photographie. Au final, ce sont de bons élèves, ils sont très concentrés et apprennent très vite ! On samuse, on rit. Fous rires garantis lorsquils se voient sur lécran. Allez, pour fêter cela, Traou Mad pour tous ;-).

Je suis heureuse, très heureuse ! Mais ce bonheur dêtre par terre dans une yourte, entourée de ces nomades, est difficile à transcrire par des mots.
On dit souvent : » Échanger, c’est donner et recevoir en retour «
mais au fin fond de lAfghanistan, cest un peu risqué
Et hop, une dose dopium
Non je déconne
Non, le chef de famille nous apporte un plat de
panse ? intestin ? noyé dans du beurre. Huuuummm, je sens quon va se régaler, les amis ! Échange de regards
Bon ben quand faut y aller, faut y aller
et avec le sourire, sil vous plait ! Gloups !!! Sans commentaire !!! On loublie souvent, mais le trek est une activité à haut risque !!!! Vite, vite, une nouvelle tournée de Traou Mad (si si, je suis quelquun dextrêmement généreux !)
Y a pas à dire, la Bretagne ça a vraiment du bon 😉
Cest lheure de la traite des yacks ! Tout le monde dehors ! Les femmes saffairent autour des yacks. De mon côté, je suis ma nouvelle copine, elle va chercher un petit dans lenclos et lamène à sa mère pour faire monter le lait, puis lattache plus loin à un piquet en bois
La traite de la mère peut alors commencer

Une photo, une…
Hommes, femmes, enfants, vieux, jeunes, à cheval ou pas
Tous veulent être photographiés ! Je ne sais plus où donner de la tête. Un jeune cavalier me demande de le photographier en train dexécuter les gestes du Bouzkachi, le sport national en Afghanistan.
Malheureusement, il est temps pour nous de partir. Le départ est difficile, je me sens presque « coupable » de les laisser
Bientôt, ce sera lhiver, les conditions de vie seront encore plus dures. Pas de bois pour se chauffer, juste de la bouse de yacks. Ici, les taux de mortalité maternelle et infantile sont les plus élevés au monde. Je me sens démunie face à un tel dénuement. Mais que puis-je leur offrir à part un sourire ?
Sur le chemin pentu du retour, les yeux embués, la gorge serrée, je ne peux mempêcher de me retourner, de faire un signe de la main jusquà ce que ces femmes ne soient plus que des petits points blancs et rouges dans limmensité de cette vallée
Le paysage est magnifique, dautant plus aux dernières lueurs du soleil. Jai toujours aimé les lacs daltitude et celui-ci est un joyau dans un écrin de montagnes et délégants glaciers
Je profite de cet instant magique.

La suite et fin, dans l’épisode 3…
Pour la galerie complète, direction le Corridor de Wakhan…
Martine